Elle y restera jusqu’en 1974. Journaliste, interprète et organisatrice efficace, elle assiste, remplie d’espoir, aux premiers pas de la jeune république, accueille les Black Panthers en exil et participe à mettre sur pied le Festival panafricain d’Alger. Ses mémoires témoignent de l’effervescence des luttes anticoloniales des années 1960, vécue dans l’intimité des grandes figures de l’époque – Ben Bella, Castro, Eldridge Cleaver –, dans une ville qui a gagné avec sa liberté des allures de capitale de la révolution mondiale. Une histoire fascinante, qu’Elaine Mokhtefi raconte avec une passion et une conviction intactes.
Compte-rendu du Monde Diplo :
Journaliste et militante, Elaine Mokhtefi a vécu en Algérie de 1962 à 1974. Lié économiquement au bloc soviétique, le pays accueillait alors plutôt généreusement des révolutionnaires du monde entier, et l’« étrange femme américaine d’Alger » allait croiser la plupart d’entre eux. Née Elaine Klein dans une famille juive de la banlieue de New York en 1928, Mokhtefi subit enfant le rejet antisémite, puis se révolte contre la ségrégation. Elle s’exile à 23 ans et ne cessera plus de militer dans les rangs anticolonialistes et anti-impérialistes. Elle n’a cependant rien d’une idéologue, et l’important aura toujours été pour elle de rendre service à la cause. Délicats et nuancés, ses portraits des figures de ce temps laissent un goût amer : les Black Panthers, par exemple, dont elle a soutenu à Alger la fraction en exil dirigée par Eldridge Cleaver, furent aussi divisés que faibles en capacités d’action. Si l’idéalisme des militants était sans bornes et bouillonnant, les actions terroristes désespérées, les désillusions individuelles et surtout l’impéritie des États « socialistes » n’allaient pas tarder à éteindre la grande flamme.