Les travailleurs de la culture en...

Les travailleurs de la culture en lutte. Le syndicalisme d'action directe face aux transformations du capitalisme...

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La sociologue Irène Pereira se penche sur le monde de la culture et ses transformations néolibérales, et sur les résistances qui s'y font jour. Dans cet essai brillant, elle observe les transformations capitalistiques à l'oeuvre et étudie comment les intermittents et autres travailleurs de la culture se mobilisent dans et à côté du syndicalisme, notamment par le recours à l'action directe...

 

Titre complet : Les travailleurs de la culture en lutte. Le syndicalisme d’action directe face aux transformations du capitalisme et de l’État dans le secteur de la culture, Paris, Éditions d’Ores et déjà, 2010, 176 p.

Une analyse de cet excellent essai dont nous reproduisons ci-dessous quelques extraits :

L’intérêt principal de son ouvrage est d’avoir enquêté sur le secteur de la culture et de la création dans une période où plusieurs logiques se sont renforcées. Du côté du Ministère de la culture et de la communication, on assiste à la rationalisation du fonctionnement de ses équipements, soumis, depuis 2007, à la Révision générale des politiques publiques (RGPP), et au désengagement de l’État de certaines de ses activités. Ces mutations, accompagnées du non remplacement d’un fonctionnaire sur deux et de l’introduction du New Public Management, se traduisent notamment par le recours à la sous-traitance. Du côté des industries culturelles, les enquêtés travaillant dans l’édition ou l’exploitation cinématographique dénoncent le caractère commercial des productions ainsi que la précarité de l’emploi. (...)

Ainsi, dans un contexte marqué, d’un côté, par le déclin syndical qui commence dès les années 1970 et par des transformations capitalistiques qui s’accélèrent, l’auteure se demande si le syndicat peut encore être un acteur capable de « résister au capitalisme » et de « transformer la société » (p. 13) ?

Sa réflexion repose sur une enquête centrée sur le syndicat SUD Culture Solidaires, fondé en 1996 dont la particularité est de regrouper des travailleurs du public et du privé. Elle s’appuie notamment sur douze entretiens, menés avec des militants de différents secteurs (musée, bibliothèque, Ministère, journalisme, spectacle vivant, édition, exploitation cinématographique) auxquels s’ajoutent des éléments empiriques tirés d’une « participation observante » (p. 56). Irène Pereira travaille en effet depuis 1998 comme agent d’accueil et de surveillance à temps partiel dans un musée et milite à SUD Culture Solidaires depuis 2005.

Deux grandes parties structurent ce court ouvrage   : la première traite de la montée de la précarité dans le secteur de la culture et du rôle joué par SUD face à ces transformations, la seconde aborde plus directement la RGPP mise en place au Ministère de la Culture depuis 2007 et les actions syndicales visant à lutter contre cette politique.

Le diagnostic traitant des transformations du secteur public de la culture est d’abord illustré par les propos issus des entretiens menés. Les réformes de l’État, contribuant à « marchandiser » la culture et à externaliser certaines de ses missions, apparaissent, aux yeux des personnes interrogées, non pas comme un phénomène nouveau mais comme l’accélération d’un processus plus ancien. Du côté des industries culturelles, le rapide constat dressé par l’auteure sur la base du témoignage de cinq personnes n’apporte aucun élément nouveau dans l’exposition des logiques à l’œuvre dans le travail au sein des entreprises culturelles   : recours au temps partiel imposé, travail à domicile, polyvalence, etc.

L’analyse de ces actions et sa connaissance du travail syndical réalisé par SUD Culture Solidaires pour lutter contre la précarité amènent l’auteure à définir trois types de « grammaires contestataires ». L’une, propre au syndicalisme d’action directe, caractérisé par un fonctionnement autonome et par des pratiques d’action démocratique, qualifierait l’action de SUD. Une autre, « postmoderne », serait celle des formes d’organisation en réseau et non hiérarchisées, telles que les coordinations. Enfin, une dernière grammaire de type « léniniste » renverrait au syndicalisme des organisations confédérées traditionnelles. Dans le secteur de la culture, une lutte existerait entre les deux premières pour « l’hégémonie au sein du renouveau de la contestation afin de se présenter comme l’alternative aux pratiques léninistes » (p. 62).

(...) La suite du chapitre consiste alors, non plus à saisir les dynamiques syndicales dans le secteur de la culture – et d’observer plus finement, par exemple, les éléments constitutifs de ce que Matonti et Poupeau appellent le « capital militant », ou de scruter les espaces de la négociation dans une perspective propre à la sociologie des relations professionnelles   –, mais de déterminer quel type de grammaire contestataire est le mieux adapté pour lutter contre la précarité. Le syndicalisme de lutte et d’action directe, qui préconise notamment la grève, tel qu’il s’incarne dans SUD Culture Solidaires aurait élaboré « l’une des plateformes de revendications les plus développées à ce sujet » (p. 88).

Dans la seconde partie de son livre, Irène Pereira tente, en mobilisant une approche issue de la sociologie pragmatique, de cerner le rapport à l’État des militants SUD à travers les discours et les justifications élaborés lors des actions menées contre la RGPP. Deux positions sont observées   : un rapport antilibéral à l’État qui se caractérise par la dénonciation des logiques participant au démantèlement de l’État social et un «   anti-étatisme   » partagé par certains militants de SUD, issus des mouvements anarchistes. Les dernières pages du livre mettent en lumière deux éléments essentiels quant aux mutations du pouvoir au sein de l’État   :   la reprise en main par l’État central d’un certain nombre de compétences, autrefois attribuées aux acteurs locaux (la réforme des collectivités territoriales aboutit à un renforcement du Préfet de région au détriment des Directeurs des affaires culturelles) et l’apparition d’un nouveau type de haut fonctionnaire, acteur du tournant managérial et gestionnaire, dont la carrière repose davantage sur les liens interpersonnels avec son supérieur que sur les principes du mérite liés au modèle bureaucratique.


 

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